La Chambre des comptes a présenté le 30 juin dernier son rapport annuel aux députés de la commission des finances et du budget de l’Assemblée nationale. D’après ce rapport, les comptables publics ont enregistré de nombreux déficits et n’ont pas apuré ces manquants même après la mise en débet de ces comptables. Ainsi, d’après les chiffres annoncés par la Chambre des comptes, pendant trois ans (en 2005, 2006 et en 2007), les comptables publics ont fait perdre au trésor public la somme de 10 milliards 177 millions de francs Cfa (voir tableau ci-dessous).
Pour la chambre, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public est engagée à hauteur des déficits et manquants qu’il aura provoqués. Mais, ces déficits ne sont pas toujours relevés sur les salaires de ces comptables mis en débet par le ministère des Finances. « Plusieurs balances générales des comptes présentent des déficits qui persistent dans les écritures des comptables de base après que les actes de mise en débet aient été pris à l’encontre des auteurs desdits déficits et que des précomptes courent sur les salaires de ces derniers », indique le rapport de la chambre.
« Aussi, saisis par la Chambre des comptes pour fournir les diligences menées à dessein de régulariser les déficits, les comptables produisent-ils parfois des actes de mise en débet qui, à la vérification, n’ont pas abouti à des précomptes sur les salaires des mis en cause », note le rapport.
Contestation
Les chiffres annoncés par la Chambre des comptes sont contestés par le ministère des Finances, bien qu’il reconnaisse le problème. En effet, le 02 novembre 2009, répondant à une correspondance du président par intérim de la Chambre des comptes, Théodore Mbenoun, à ce sujet, Essimi Menye écrit : « Je précise toutefois que les données disponibles au niveau du ministère des Finances ne correspondent pas aux chiffres avancés dans votre rapport ». Ceci après avoir pris acte des recommandations de la chambre et après avoir reconnu le non apurement des déficits dans les écritures comptables après la mise en débet des auteurs. « J’ai donné des instructions pour que tous les cas de cette nature soient recensés et régularisés. Il vous sera rendu compte des résultats de ce travail en temps opportun », écrit Essimi Menye.
Au ministère des Finances, le reporter du Jour n’a pas pu entrer en possession des chiffres contradictoires. « Ce sont les chiffres que seul peut détenir le directeur général du Trésor qui, actuellement, est souffrant. Et même s’il était disponible, je ne suis pas sûr qu’il devait vous les procurer », affirme un cadre à la direction générale du Trésor.
Pour mettre un terme à cette situation, la Chambre des comptes recommande de « veiller, au niveau du ministère des Finances, à l’aboutissement des actes de mise en débet administratif et aux précomptes effectifs du montant du débet sur le salaire du mis en cause ».
Joseph Belibi, premier avocat général près la Cour suprême et en service à la Cour suprême
“Nous invitons les comptables à combler les trous”
Quand les comptes des comptables publics sont déposés au greffe, un magistrat des comptes les épluche pour voir s’ils sont réguliers. Son rapport est transféré ici au parquet général. Je l’étudie également ou je le confie à un autre avocat général qui l’étudie à nouveau. Nous aussi, nous faisons nos conclusions. A ce moment, la Chambre des comptes rend soit un arrêt de débet, soit un arrêt de réserve. Les injonctions retenues vont être portées à la connaissance du comptable contrôlé qui doit en répondre. S’il y a des sommes qui manquent, on l’invite à combler les trous. S’il ne peut pas justifier ces déficits, on rend un autre arrêt qui cette fois-ci est définitif et qui le condamne à rembourser telle ou telle somme à l’Etat. Il y a ainsi plusieurs comptables qui ont déjà été mis en débet.
On voit ici les risques du métier de comptable public. Les contrôles ne sont pas à éviter pour le comptable que ce soit dans les entreprises privées ou la comptabilité publique. Pour le comptable, il faut présenter une comptabilité claire avec des justificatives claires, mais les exceptions ne manquent pas.
Quand le contrôleur est contrôlé….