Le ministre de l’Energie conteste l’augmentation des prix, alors que l’entreprise américaine affirme qu’elle applique simplement les dispositions du contrat de concession.
Les termes du communiqué du ministre de l’Energie et de l’Eau, Michaël Ngako Tomdio, signé le 31 mai 2010, indiquent la tension qui règnent entre le ministère et Aes Sonel, l’entreprise américaine de production et de distribution de l’électricité au Cameroun : « L’opérateur Aes-Sonel a procédé de manière unilatérale, à partir du mois d’avril 2010, à l’augmentation des tarifs d’électricité des usagers Mt et BT au mépris des instructions gouvernementales et des dispositions des contrats de concession qui le lient à l’Etat du Cameroun ». Face à cette situation, le ministre demande à Aes Sonel d’annuler cette augmentation. « Je porte à la connaissance des usagers du service public de l’électricité que j’ai demandé à cet opérateur de procéder à l’annulation de cette augmentation. En conséquence, la grille tarifaire applicable reste celle en vigueur avant ladite augmentation », précise le communiqué de Michaël Ngako Tomdio.
Les responsables d’Aes Sonel affirment, quant à eux, qu’ils ne font qu’appliquer les dispositions du contrat de concession. « C’est une modification des tarifs que nous avons engagé avec le gouvernement sur la base d’un dossier qui a été communiqué au régulateur en octobre (octobre 2009, ndlr) pour une modification des tarifs en janvier (janvier 2010, ndlr). Tel que prévoit la concession, un dialogue a été engagé pour voir si cette augmentation pouvait être compensée par un versement de fonds à l’entreprise. Cette négociation est encore en cours. En attendant qu’elle aboutisse, le contrat de concession prévoit que nous pouvons aussi procéder à une augmentation de 5% et c’est ce que nous avons fait. Nous l’avons fait en toute conscience, parce que nous pensons que c’est dans l’intérêt du consommateur », explique Jean David Bilé dans la newsletter de l’entreprise, Aes Sonel Today, du 27 mai 2010.
Investissements
Le directeur général d’Aes Sonel explique que l’argent de cette augmentation, qui ne concerne que 13% des consommateurs (ceux qui consomment plus de 401 Kw), servira à financer les investissements de l’entreprise pour augmenter et améliorer la qualité de l’offre énergétique au Cameroun. 58 milliards de francs Cfa sont engagés cette année sur l’ensemble du pays et 50 milliards de francs Cfa sont prévus l’an prochain. Au ministère de l’Energie et de l’Eau, personne ne veut commenter le communiqué du ministre à visage découvert. « Seul le ministre peut parler et actuellement, il n’est pas à Yaoundé. Il reviendra jeudi (ce jour). Mais en général, il faut savoir que le gouvernement s’est engagé depuis 2008 dans une politique de baisse du coût de la vie et de stabilisation des prix sur le marché. C’est la politique prônée par le chef de l’Etat en personne. Et il est hors de question que Paul Biya dise qu’il faut baisser ou stabiliser les prix et que nous cautionnions l’augmentation de Aes Sonel », soutient sous anonymat un collaborateur du ministre.
Les associations de consommateurs qui avaient décidé de surseoir au « Guichet mort » qu’ils avaient annoncé pour le 1er juin 2010 sont revenues sur leur décision après une rencontre d’explication avec la direction d’Aes Sonel. Aujourd’hui, elles se réjouissent de la décision de Michaël Ngako Tomdio. Paul Gerémie Bikidik est le président du Réseau associatif des consommateurs de l’électricité. « Si Aes Sonel ne revient pas sur cette augmentation comme l’a indiqué le ministre, nous allons reconduire la campagne « Guichet Mort », qui a trouvé une adhésion massive des consommateurs », affirme-t-il. Mais sa joie est masquée par une appréhension. « Nous craignons que cette sortie de Michaêl Ngako Tomdio ne soit qu’un coût d’épée dans l’eau, un simple effet d’annonce. Depuis le 18 juillet 2001, les consommateurs sont pris en otage entre le gouvernement et l’opérateur Aes-Sonel qui se rejettent les responsabilités de la gestion calamiteuse du secteur de l’énergie électrique », affirme-t-il. « A mi-parcours du contrat de concession, il faut absolument renégocier cet accord inique et antipatriotique », pense Paul Gérémie Bikidik.
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